lundi


"If only I were less sane. I could write poems the size of cathedrals!" (Don DeLillo)

samedi

Carte Postale



MOMBASA

Les Tusks de l'avenue Moi
se chantent d'une voix grave.
La voix du trou du cul du Monde
Frottant une bite d'amarrage.

mardi

Condamnés à la Confiance




Le monde est une boite noire. Tout les processus qui s’y déroulent peuvent être compris comme des inputs qui subissent une transformation dans cette boite pour en ressortir sous forme d’outputs, différents. Ainsi, des arbres peuvent être transformés en table. Ainsi, des idées peuvent être transformées en système philosophique.

L’éducation a pour objectif de rendre explicite le fonctionnement de cette boite noire, de la rendre, justement, moins noire. On apprend par exemple le processus qui démarre de la coupe d’un arbre pour arriver au produit fini qu’est une table, via la scierie et la menuiserie. A un niveau de sophistication supérieure, l’éducation peut élucider les processus d’abstraction et d’imagination nécessaires à la production d’un système philosophique viable.

Du fait de la prodigieuse complexification du monde ces dernières années, l’éducation n’est plus a même d’expliciter le fonctionnement de la boite noire. La boite s’opacifie et au mieux n’a-t-on qu’une idée parcellaire du fonctionnement de quelques processus. Qui peut expliquer le fonctionnement de son smart phone ? Comment une pression tactile (input) devient au final un message lisible par l’interlocuteur (output) ?

Cette opacification de la boite noire nous plonge dans une société dans laquelle nous sommes condamnés à la confiance. Prenons un exemple trivial : suite à l’entretien de votre auto, le garagiste vous annonce qu’il a changé le filtre de votre air conditionné. Vous lui affirmez que c’était inutile, car vous n’utilisez jamais l’air conditionné. Il réplique que cela n’a rien à voir, c’est un filtre pour l’aération en général. Il vous propose de vous montrer le filtre qui a été changé et vous pourrez constater par vous-même la nécessité de le changer. Que faire à ce moment si ce n’est faire confiance au garagiste. Vous n’avez jamais vu ce type de filtre auparavant. Il pourrait être blanc, gris, noir, parfaitement lisse ou fait de peluche, dans n’importe quel cas, vous seriez incapable de déterminer s’il était nécessaire de le changer ou non.

L’éducation est donc dépassée par la complexité du monde dans lequel nous vivons. Nous devons toujours nous reposer sur un expert (un garagiste), déclaré tel par d’autres experts (la marque qui l’a formé et a délivré son diplôme), pour utiliser les artefacts du monde. Ainsi, sommes-nous à tout moment dépendant des autres et condamnés à leur faire confiance.

dimanche

Emerger en 2013



 (Psychose, 2013, 2012)


J’efface ma tête. Je suis l’Autre, une association d’idées improbable. Des yeux collés au Carnaval me donnent une soudaine fascination pour la langue de Goethe. Elle scelle hermétisme et poésie dans un Dichtung und Warheit.

Je rejoins Jay W. à bord des cendres de la peur. Nous accostons une ville brute et antique accompagnés du légionnaire suisse. Il arrime les horreurs du large aux bites d’occultes grandes gueules.  Elles crachent des rats gros comme le bras. Et hurlent de superbes travestis au cul rebondi.

Et les bars et les pintes et les rues crasseuses. Battre le pavé, hésiter et finir par échouer à bander. Et bras dessus bras dessous en bourrades bourrées. Et nous infligeons une correction au Pleurard M. Rilke. Le monde se taira inéluctablement. Sa mâchoire reprendra conscience sur un carrelage couvert d’urine. Les dents mêlées à la porcelaine brisée d’un évier.

Nous le prendrons par la main. Lui pardonnerons. Et nous lui montrerons das letzte Blockhaus der Welt, perdu au bord de la Mer Suprême. Couvert de graffitis. Des poèmes lapidaires. Au réveil du réveillon, la langue dans un sable humide, je lui ferai arrêter de boire. Pour écrire. Plus. Lire. Plus. Arrêter de boire. Et recommencer à fumer.

vendredi

De vent devant



Sur les bords d'un Gange anxieux
Je me répands
En un chant soufflé de vent
Devant, devant

dimanche

Saint-Emilion



Trop d’événements riment en une seule journée. Ce souffle court qui en rappelle un autre. Jusqu’à ce moment, il donnait des couleurs à l’oisiveté aride à coup de rouge. Lui donnait du relief à coup de bulles. Et de la perspective dans la fumée. Entre deux bouffées, elle lui avoue qu’elle compte chacune de ses cigarettes. Comme autant de moment qu’ils ne partageront plus.  Le couple éternel – angoisse thématique et schémas culpabilisants. Sa propre mort et l'impuissance de la spectatrice. Pourquoi ne cesses-tu pas, tout simplement ? Le simple est l’erreur des génies (il essaie de gagner du temps et récite) “Je crois qu’un jours on s’égare et que ça ne s’arrête jamais.” (il prend une gorgée et bafouille d’aise) “Tout est blablabla, tout est volé. Il n’y a personne à appeler.” Il hésite. Entre deux gorgées, la nausée. Il croit dit-il. C’est ma façon, lui avoue-t-il pour lui-même, ma façon lâche de te quitter. Je tâche, méthodiquement, de nous séparer. Subrepticement. Une larme coule de l’oeil. Il s’en détourne à distance. A bout du bout incandescent. Un homme grimace en terrasse. Trop loin pour qu’elle soit entendue. Hors-contexte, il renvoie au monde.  L’anime. L’anima. L’animal. L’animalité. Une cascade domino nous a précocement enseigné le déterminisme. Une conversation de singes nous renvoie à une conversation de singes nous renvoie aux conversations des singes. Et soudain la conscience de la multitude. Et de notre ridicule. Tout est dérobé ? Elle pleure. Il est déjà loin.

Ochtendongeval


Le fracas métallique du tram m’a réveillé. J’ai pensé : “Je veux être moi-même, mais en Italie” et j’ouvre les yeux sur cette Rome vaincue par les barbares. Je me suis réveillée et les marches ont craqué sur le chemin du café. Je me suis levé et je n’ai pas reconnu la place au miroir. Où l’ancien sourit de confiance au moderne. Je suis levée un bonnet sur un sourire. Je sens dans le vent l’odeur du pain, du beurre, du pain au beurre. Je lui ai dit : “J’aime ta chemise”. Il a grimacé de sympathie. Je lui ai rendu sa sale face. Et je me suis reconnu. Les gants qui serrent de froid le bonheur. Des coups de pédales sur l’euphorie d’un matin muet d’hiver. Je me suis levé et j’étais incapable de nouer ma cravate. Filer sur le caoutchouc. Etre une brise sur l’avenue, courir en tête de peloton, le nez tendu vers l’amour. Je boutonne mon col. Je pense à ces Grandes Choses. Le fracas métallique du tram m’a réveillée. Je suis un boyau pris dans les rails. Je suis le tram fracassant. Je suis un bonnet de terreur, perdue dans les boyaux. Je suis un aurevoir. Le fracas métallique du tram l’a réveillé. L’aube est brutale.