mercredi

Mea Maxima Culpa









Mon prof de français – que, dans un souci d'anonymat, je nommerai Jimmy Hendrix, mais auquel je fais ici un hommage emprunt de respect – nous avait prévenu. Après avoir reçu son enseignement, nous serions changé. Nous serions changé d'une façon si radicale que notre écriture s'en trouverait modifiée. Pas seulement son contenu ou sa forme syntaxique, mais la forme même de sa calligraphie. Il nous montra, comme preuve historique, ses propres travaux de jeunesse. Après son passage chez un prof de français marquant, le trait de son écriture avait effectivement prit d'autres atours.

Il ne nous avait pas menti. Mon écriture arrondie, presque féminine, se rigidifia, devint moins lisible – on ne peut pas toujours distinguer les n, les r et les v –, plus inconstante aussi – avec des m et des n qui ne sont pas toujours écrits de la même façon – et emprunta même des graphèmes à l’alphabet grec.

(Cela dit, je me rends compte aujourd'hui que même sans son intervention, on pouvait s'attendre à ce que l'écriture de jeunes gens change entre leurs 16 et leurs 18 ans)

Jimmy Hendrix nous a aussi appris la différence entre une personne et un individu – auxquels j’ajoute aujourd’hui les gens que je dis en crachant –, entre le nous et le on et ses opinions.

Jimmy Hendrix m’a un jour appelé L'homme qui versifie plus vite que son ombre et c’est sans doute le seul compliment qu’il m’ait jamais fait (si c’était un compliment). A côté de ça, sa première note dans mon carnet de poésie était

Et tout fut fou

Et tout fut foutu

Je me souviens aussi de ses Louvoyez moins, lisez plus ! – en référence à mes activités glissantes – et autre Mais comment diable ponctuez-vous ? Désolé, Jimmy, pour ça, je ne pense pas être soigné.

Il me laisse aussi quelques règles en souvenir : Et et mais ne sont jamais placés au début d’une phrase ; Car et mais sont toujours précédés d’une virgule ; et la plus belle Il est bon, il est beau, il est français de placer les éléments d’une énumération dans l’ordre croissant du nombre de leurs syllabes.

Encore aujourd’hui, treize ans plus tard (merde quoi), je n’écris pas sans penser à lui. Je dirais même que c’est un peu grâce à lui que j’écris. J’espère juste qu’il ne se retourne pas trop souvent dans sa tombe.

Jimmy Hendrix affirmait que les nouvelles idées prennent un siècle avant de devenir des opinions générales. Partant de là, je dois présenter des excuses pour ma condamnation hâtive de l'essai de Naomi Klein. En 2101, on peut donc s'attendre à un mouvement politique de grande envergure qui va renverser l'empire des marques... Patience donc. La révolution approche à grands pas. Personnellement, j'aurai à peine 122 ans. En pleine force de l'âge, ce sera toujours une joie pour moi que de renvoyer les lacrymos aux poulets.

Peace Jimmy.

Bibbona

Juillet 2009

2 commentaires:

  1. Mais c'est vrai (sorry, Jimi) que tu deviens de plus en plus anarchiste. Tant mieux. Par contre, faut que t'arrêtes d'appeler cette pauvre Naomi Klein, Noami... Ben ouais quoi... Pareil pour Jimi, zut. ;-) Aussi, ça m'intéresserait d'en savoir plus sur cette question de la personne et de l'individu, si l'envie te prend de développer sur ce thème...

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  2. J'ai une idée assez claire de cette différence, mais il faudrait que je me replonge dans ces vieux cours pour pouvoir la formuler correctement. J'y penserai.

    Merci pour la correction.

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